Attention, cet article va spoiler une partie du roman !
Si vous ne l’avez pas encore lu, vous pouvez trouver le résumé complet sur cette page.
Si vous ne craignez pas le spoil, continuez à vos risques et périls 😉
Dans le roman Qui ment ? de Karen Mcmanus, le personnage d’Addy prend progressivement conscience, tout comme le lecteur, que sa relation parfaite dissimule une relation toxique. Son petit ami, loin d’incarner l’homme idéal, se révèle être manipulateur. Il contribue d’ailleurs à une vengeance démesurée pour la punir de son infidélité.

Addy

Plus on découvre Addy, plus on comprend pourquoi elle s’est retrouvée enferrée dans cette relation malsaine. Il y d’abord sa mère, obsédée par la jeunesse et la beauté, persuadée qu’une femme n’est rien sans un homme. Critique envers ses filles sur leur apparence physique, elle ne les trouve pas la hauteur de ses enseignements en matière de relations. Ce pourrait être comique lorsqu’on considère qu’elle-même enchaîne les conquêtes, cherchant sans cesse le partenaire idéal. Mais ce qui transparaît surtout c’est le triste portrait d’une femme convaincue que sa valeur se jauge par le regard d’un homme. Elle s’est forgée une personnalité entièrement sur cette superficialité et tente de la transmettre à ses filles.
Ses amies
Il y a ensuite les amies d’Addy. Sûrement influencée par sa mère, Addy s’est retrouvée entouré de gens aussi superficiels qu’elle. Membres de la bande des élèves populaires du lycée, les filles qui la composent sont prompts au jugement et aux critiques. Lorsque l’infidélité d’Addy sera dévoilée, elle sera aussitôt mise au ban de ce groupe d’amis. On devine que les garçons le font par solidarité pour Jake. Mais les filles se montrent si hargneuses et virulentes avec elle, qu’on s’interroge sur la raison qui les poussent à aller si loin. Elles iront jusqu’à tenter de la blesser physiquement.
Dans une société où les femmes peinent à revendiquer leur place, ces jeunes filles semblent avoir intégré la culture des apparences et de la misogynie. Afin de conserver leur statut auprès de la bande et des garçons, elles se désolidarisent de manière spectaculaire de celle qui a fauté pour éviter toute association.
Jack

Enfin il y a Jake : le petit copain soit disant idéal qui se révèle être un manipulateur en puissance. Ensemble depuis le collège, il représente sa première relation sérieuse. Modelant ses valeurs sur celles de sa mère, on comprend que Jake puisse avoir l’air du prince charmant aux yeux d’Addy. Il est gentil, attentionné, présent. Dans les faits, il exerce une emprise croissante sur elle. Il gère leur vie sociale, les gens qu’ils fréquentent, sa façon de s’habiller. Elle coiffe ses cheveux comme il aime, ensemble ils ne parlent que de sujets qui intéressent Jake.
Elevée comme s’il était normale de se plier à la volonté et aux envies de son partenaire, Addy se convainc elle-même que la situation lui convient. Le jeune homme avec qui elle trompera Jake lui fera entrevoir pour la première fois une autre facette d’elle-même. Connue pour être mignonne et effacée, elle découvre le temps d’une soirée qu’elle peut être très drôle et imparfaite. Tromper la personne qu’on aime n’est jamais la solution. Mais ici on comprend qu’Addy a cédé à son envie après s’être sentie libre pour la première fois de sa vie. Ce qui l’aide d’ailleurs à surmonter plus tard sa rupture avec Jake. Loin de lui, elle apprend à s’affirmer, à découvrir ses passions. Elle passe d’une ombre à une personne pleine et entière.


Les relations toxiques dans les romans Young Adult
À l’heure actuelle, la compréhension des relations toxiques et de leurs répercussions s’affine de plus en plus. De nombreuses voix se font entendre pour analyser et alerter sur les relations malsaines. Le soutien aux victimes et la démarche de les déculpabiliser gagnent en importance, grâce à l’action notamment d’associations relayant informations, aide et soutien.
Le but est bien de briser définitivement la norme actuelle qui encourage le silence des victimes et le slut-shaming de leur détracteur. Etroitement lié avec la lutte contre la masculinité toxique, la culture du viol et plus généralement le patriarcat, il nous faut constater qu’il reste encore fort à faire.
Qui ment
Je trouve que le roman évoque le sujet de façon superficiel et en donnant peu d’informations. Mais il faut reconnaitre que Karen Mcmanus dans Qui ment? a le mérite de parler et de dénoncer un sujet grave; l’emprise toxique que peut exercer une personne sur une autre.
J’estime qu’il est crucial, surtout dans la littérature adolescente et jeune adulte, d’explorer une variété de thèmes. En particulier ceux traitant de sujets de société. C’est durant cette période que nos opinions et nos valeurs commencent à prendre forme, d’où l’importance d’une sensibilisation maximale. Contribuer à créer un monde plus sain et empathique peut, entre autres, passer par la lecture 😉
Bien que je sois profondément intéressée par le sujet, je me sens souvent peu compétente pour l’analyser et en détailler tous les aspects. Si, comme moi, vous aspirez à vous instruire et à approfondir votre sensibilisation, voici mes recommandations de lecture sur le sujet. Qu’il s’agisse de romans, de bandes dessinées, de littérature pour adultes ou adolescents, je vous propose divers supports offrant différents angles de compréhension qui m’ont marqué.
Mes recommandations:
- Tant pis pour l’amour de Sophie Lambda. Témoignant de façon anonyme, l’autrice dessine cette BD pour raconter sa vie de couple avec un manipulateur narcissique. On assiste à sa descente aux enfers puis sa reconstruction. Pensée comme un manuel de survie aux relations toxiques, elle donne des outils très utiles à la fin: un annuaire d’associations pour trouver de l’aide et un « violentomètre » qui donne la météo du couple et rappelle les comportements versant vers le toxique.
- Mes ruptures avec Laura Dean de Mariko Tamaki. Enferrée dans sa relation avec Laura, Freddy mettra du temps avant de réaliser que son couple n’a rien de sain et réussir à se libérer du comportement autocentré et manipulateur de Laura. Une très jolie BD tout en émotions peignant avec justesse le combat intérieur de Freddy.
- Une fille facile de Louise O’neill. Emma est la plus jolie et la plus intelligente de sa petite ville. Un matin elle se réveille devant chez elle, incapable de se rappeler la fête de la veille. Mais les photos et vidéos postées sur internet sont là pour raconter à tout le monde l’horreur de sa soirée. Pourtant, c’est contre elle et non contre ses violeurs que se retourne l’opinion publique… Dur à lire mais écrit avec intelligence et beaucoup de nuances, ce roman est une très bonne façon d’aborder la culture du viol et du slut shaming.
- Le consentement de Vanessa Springora. V. a 13 ans lorsque commence sa relation avec G., écrivain de 50ans habitué des conquêtes mineurs et du tourisme sexuel de même âge. Longtemps, elle sera tourmentée par son emprise, puis par sa morgue destructrice lorsqu’elle le quittera. Tandis que G, lui, sera soutenu et protégé par ses pairs. Dénonçant dans ce roman autobiographique une situation que l’on découvre banale pour le milieu artistique, Vanessa Springora écrit avec lucidité sur son époque. Porté à l’écran en 2023, beaucoup espère que ce coup de pied dans la fourmilière fera changer les choses.
- Tout ce que dit Manon est vrai de Manon Fargetton. Manon a 16 ans, Manon est solaire, Manon est prometteuse dans le dessin. Lorsqu’elle se fait repérer par un éditeur (de 30 ans son aîné) qui veut la prendre sous son aile, tout semble pour le mieux. Pourtant, petit à petit, son entourage décrit une relation étrange et malsaine qui se tisse entre la jeune fille, l’éditeur et la femme de celui-ci. Utilisant sa jeunesse pour écrire un roman quasiment autobiographique, Manon Fargetton explore son histoire du point de vue de tous sauf de l’héroïne. Le récit saute d’une vision à une autre pour dévoiler morceau par morceau plusieurs vérités qui viennent construire celle de Manon.
- Nous les filles de nulle part d’Amy Reed. Une galerie de portraits, filles comme garçons, élèves du même lycée racontant tous ensemble une histoire. Celle de Grace qui vient d’emménager dans une nouvelle maison. Celle de l’ancienne occupante Lucy qui a déménagé suite à son viol et le harcèlement qui en a découlé. Dégouttée et révoltée après l’avoir découvert, Grace entrainera les autres adolescentes qui ne supportent plus la glorification des garçons de leur établissement à se serrer les coudes. Ensemble elles dénonceront, défendront, sensibiliseront toutes les jeunes filles autour d’elles, appelant à ce qu’elles les rejoignent. Sans lourdeur ni préjugés, Amy Reed traite autant de féminisme que d’apprentissage de la vie. Si vous ne deviez en lire qu’un, lisez celui-là!






Les relations toxiques dans le genre policier
Dans la littérature policière, les relations malsaines, l’emprise et la manipulation de l’autre sont des sujets facile à exploiter. Créant des situations anxiogènes et inquiétantes, ces thèmes deviennent vite horrifiques. Je vous donne ici la liste des enquêtes qui décrivent le mieux, selon moi, ces relations toxiques et leurs conséquences.
Mes recommandations:
- La deuxième femme de Louise Mey. Sandrine a une piètre image d’elle-même et peu de joie dans sa vie. Tout change lorsqu’elle rencontre enfin celui qu’elle peu aimer à corps perdu, celui qui la regarde réellement. Mais avant elle, il y avait une épouse et une mère. Qui a disparu depuis peu. Et qui réapparait, mettant en péril son nouveau bonheur inespéré. Au fil des pages monte une tension psychologique dont vous ne devinerez jamais l’issu…
- La fille d’avant de JP Delaney. Alors que Jane cherche un nouveau foyer pour un nouveau départ, elle obtient l’autorisation de séjourner dans le chef d’œuvre architectural d’Edward Monkford. En contrepartie, elle doit se plier aux règles de l’architecte pour conserver l’intégrité de la maison. Elle se retrouve vite subjuguée autant par l’endroit par son créateur. Ce qui ne l’empêche pas de commence à angoisser dans cette espace qui semble vivant. D’autant plus qu’elle découvre rapidement qu’Emma (qui lui ressemble étrangement), qui habitait la maison avant elle, a tragiquement péri. Et Jane semble bizarrement marcher dans les pas de la disparue…
- Celle qui pleurait sous l’eau de Niko Tackian. Clara, jeune femme lumineuse et passionnée, vient d’être retrouvée flottant dans une piscine. Les poignets tranchés indiquent d’emblé un suicide et la police ne creuse pas plus loin. Mais le commandant Tomar Khan, poussée par son amante et collègue Rhonda, se saisit de l’affaire pour tenter de reconstituer cette nuit tragique. Comment une personne si pleine de vie et possédant tout en vient à se trancher les veines loin du monde? Une enquête qui les bouleversera tous…
- Les apparences de Gillian Flynn. Après 4 ans de vie commune aux allures de paradis, la vie de Nick bascule. Il rentre chez lui et découvre sa maison ravagée, sa femme disparue. Le voilà obligé de soumettre l’image de son couple parfait au regard scrutateur de la police. Tout les mensonges, toutes les petites trahisons, toutes les petites lâchetés du quotidien apparaissent d’un coup au grand jour. Les révélations douloureuses s’enchaîne pour Nick qui découvre bientôt que sa femme avait fort à cacher. Il commence seulement à comprendre à quel point son mariage n’était qu’une illusion…
- Le couple d’à côté de Shari Lapena. Alors qu’Anne et Marco passent la soirée chez leurs voisins, leur petite fille disparait. Laissée seule dans leur maison après que la baby-sitter leur ai fait faux bond, ils pensaient pourtant leur surveillance sans faille. Grâce au babyphone et à une vérification régulière, ils étaient sûr que la petite était en sécurité. Alors que l’enquête de police fouille dans les vies de tous, chacun dévoile son coté obscur et plus personne ne semble innocent…
- Parfaite de Caroline Kepnes. Lorsque Joe rencontre Beck, il a un coup de foudre fulgurant. Au point de fouiller sa vie, au point de la suivre partout. Persuadé que pour aimer il faut posséder, cet homme « simplement amoureux » met au point une toile machiavélique pour que Beck l’aime en retour. Mais Joe a beau être obsédé par la jeune femme, il n’a peut-être pas encore découvert toutes les facettes de celle qu’il désire… Pour les amateurs.rices de la série YOU, voici le roman qui l’a inspiré 😉






Et vous, quelles sont vos recommandations?
Trouvez vous pertinente la façon dont est traitée la relation Jake/Addy?
Photos tirées de la série américaine Qui ment? (One of us is lying?) créée par Erica Saleh
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